Jean-Christophe Couvy, président de l’Ircantec : « Faire évoluer notre Régime dans l’intérêt de tous ses bénéficiaires »

5 déc. 2025

Quelle est la particularité de l’Ircantec, caisse de retraite complémentaire créée en décembre 1970 ?

L’Ircantec est une caisse de retraite complémentaire obligatoire pour tous les agents contractuels de droit public des trois fonctions publiques de l’Etat, ainsi que pour d’autres catégories telles que les élus locaux et les praticiens hospitaliers. Son originalité tient à ce que le régime obligatoire de retraite est par répartition, liant entre elles les générations, et par points. L’avantage du point est que lorsque la personne part en retraite, elle sait ce qu’elle aura, le nombre de points étant reconverti en allocation de retraite complémentaire.

La particularité du Régime est sa gouvernance paritaire, solidaire et proche des retraités, des affiliés et des employeurs. Nous sommes un ménage à trois, à savoir les représentants des bénéficiaires du régime qui négocient avec les représentants des employeurs, et des personnalités qualifiées. La Caisse des Dépôts, via la Direction des politiques sociales (DPS), est en effet gestionnaire du Régime et met en œuvre les décisions du Conseil d’administration*.
Nous recherchons et trouvons toujours un consensus entre nous. L’important est de se parler, de s’écouter, de se convaincre. Le Conseil d’administration est une véritable agora !

Quelles sont précisément les prérogatives du Conseil d’administration ?

Il a un pouvoir décisionnel sur toutes les questions relatives à la gestion du Régime – il en fixe les paramètres -, au pilotage technique à long terme, à la politique de placement et à l’action sociale. Le Régime doit toujours être à l’équilibre et pérenne. Ce qui signifie que nous devons être solvable avec des réserves équivalentes à au moins 18 mois de prestations pendant 20 ans. Aujourd’hui, celles-ci s’élèvent à 17,2 milliards d’euros et garantissent le paiement des pensions sur 30 ans, soit une génération et demie.

Vous avez été élu président du Conseil d’administration en juin 2025. Quelles lignes essentielles donnez-vous à votre mandature ?

Je m’inscris dans la continuité des actions menées par mon prédécesseur, bâties sur une politique de proximité et d’engagement. Les projets affichés sont tout d’abord de faire davantage connaître et rayonner l’Ircantec. D’expliquer notre investissement dans l’économie réelle et vertueuse, dans des entreprises plus respectueuses des droits humains et environnementaux. De mettre en avant la diversification de notre portefeuille et notre investissement dans les structures d’habitat intergénérationnelles. Ensuite, nous entendons répondre au plus près des besoins des retraités, en particulier les plus modestes, les plus fragiles, grâce à notre politique d’action sociale.

Face à une démographie vieillissante, notre commission du fonds social s’occupe notamment des personnes âgées et s’attache à prévenir les risques d’isolement des retraités. Pour les uns, la retraite est une libération, mais pour d’autres, c’est une angoisse, une perte de repères et de salaire, le risque d’un repli sur soi-même. Pour lutter contre l’isolement, un fonds social d’environ 15 millions d’euros est alloué. D’autres types d’actions d’accompagnement sont menés, comme l’aide « énergie » et le soutien à la rénovation thermique du domicile des retraités, ou encore les services à la personne pour bien vieillir chez soi, le plus longtemps possible. L’Ircantec est également partenaire de la fédération France Alzheimer en apportant une aide aux aidants et aux malades. Pour les jeunes, nous investissons dans les résidences étudiantes. Enfin, notre investissement immobilier tourné vers les vacances sociales (UCPA et Vacances bleues) permet aux seniors de profiter de séjours abordables aux familles.

L’Ircantec est très engagée dans le domaine de l’Investissement socialement responsable (ISR). Quel est le sens de votre démarche ?

Dès 2008, l’Ircantec a mis en place une démarche ISR sur son portefeuille d’actifs. L’ensemble des réserves du Régime est géré à la fois selon des critères financiers et, depuis 2012, des critères extra-financiers priorisés. Il n’est pas présomptueux de dire que nous sommes parmi les plus avancés dans le monde des retraites. Depuis lors, notre mission se poursuit et aujourd’hui, pour de petites institutions qui commencent à s’engager, nous servons même de benchmark !

La démarche ISR de l’Ircantec est pilotée par le Conseil d’administration. Notre préoccupation et notre objectif est d’optimiser le rendement de nos placements sur le long terme et d’agir au mieux des intérêts des bénéficiaires actuels et futurs du Régime. Notre stratégie consiste à communiquer davantage encore sur nos engagements et à fédérer autour de nous pour être plus fort. La coordination d’actions en matière de finance responsable s’avère déterminante pour lutter contre les vents contraires qui sévissent. Il faut penser à l’avenir et à nos enfants et petits-enfants.

Vous êtes également administrateur de Préfon et vous siégez à la commission ISR. Quelles formes de coopération peuvent être envisagées entre l’Ircantec et Préfon ?

Comme l’Ircantec, Préfon a une charte d’engagement. L’une et l’autre ont le même ADN, tout en sachant que l’Ircantec est une caisse de retraite institutionnelle alors que Préfon est une association. Nous sommes tous les deux très mobilisés et avancés sur les sujets ISR. Fort de son expérience, l’Ircantec échange avec Préfon et peut amener des idées. De son côté, dans le cadre de la stratégie d’investissement des gestionnaires financiers du régime, Préfon fait bouger les lignes avec les assureurs.

*Le Conseil d’administration compte 34 membres nommés pour 4 ans : 16 représentants des bénéficiaires du régime ; 16 représentants des employeurs dont les personnels sont affiliés au régime ; 2 personnalités qualifiées.

Repères

  • L’Ircantec a été créée le 23 décembre 1970
  • Nombre d’actifs cotisants : 3,20 millions (année 2023) dont 66% de femmes et 34% d’hommes
  • Nombre d’allocataires : 2,36 millions (année 2023)
  • Durée moyenne de cotisation : 10 ans et 3 mois